Le DERMS, ou système de gestion des ressources énergétiques distribuées, est une plateforme logicielle conçue pour optimiser, contrôler et intégrer les ressources énergétiques distribuées (solaire, éolien, stockage, véhicule électrique, etc.).
📌 4 points essentiels à retenir :
Définition opérationnelle du DERMS
Le DERMS, acronyme de Distributed Energy Resource Management System, est un système de gestion des ressources énergétiques distribuées. Il s’agit d’une plateforme logicielle dédiée principalement aux gestionnaires de réseaux de distribution (GRD). Sa mission : piloter, superviser et optimiser l’exploitation de ressources locales comme le solaire photovoltaïque, l’éolien, les batteries, ou encore les bornes de recharge pour véhicules électriques.
Différences et complémentarités avec les EMS
Contrairement aux EMS (Energy Management Systems), focalisés sur la gestion énergétique d’un site unique, le DERMS opère à l’échelle du réseau de distribution. Il oriente ses actions en fonction de la localisation précise des DER, en lien direct avec les contraintes réseau, comme la tension, la charge ou les congestions. Il se distingue ainsi d’un VPP (Virtual Power Plant), qui, lui, vise plutôt l’agrégation à des fins de participation aux marchés ou d’équilibrage global.
Focus sur la convergence IT/OT et l’architecture technique (SCADA, DMS, OMS…)
Un DERMS ne fonctionne jamais seul. Il s’intègre dans une architecture distribuée hybride, connectée à plusieurs couches d’infrastructure :
La convergence des technologies de l’information (IT) et des technologies opérationnelles (OT) est un enjeu fondamental pour permettre une gestion fluide et coordonnée de tous les actifs énergétiques. L’objectif : agir localement tout en respectant les exigences globales du système.
Les DERMS modernes reposent sur une architecture hybride. D’un côté, un pilotage centralisé depuis une plateforme logicielle centrale. De l’autre, une intelligence locale embarquée au sein des sous-stations ou postes secondaires. Ce fonctionnement permet de coordonner en cascade les actions, de la stratégie globale à l’exécution très locale.
Un DERMS collecte des flux massifs de données temps réel : production solaire, consommation instantanée, état de charge des batteries, signaux de congestion ou de tarif dynamique. Ces données sont ensuite croisées avec des modèles de prévision (météo, charge, production PV/EV) pour optimiser le plan de fonctionnement des DER sur 24h.
Le DERMS joue un rôle d’orchestrateur entre différents sous-systèmes :
Il peut, par exemple, éviter des surtensions en modulant les injections d’un parc éolien ou lisser une pointe de consommation en déchargeant une batterie selon un algorithme d’optimisation. Dans ce cadre, il agit comme le cerveau temps réel d’un réseau énergétique actif.
Visibilité, contrôle, orchestration
Dans un contexte énergétique de plus en plus complexe, les gestionnaires de réseau doivent intégrer, suivre et piloter une multitude de ressources locales. Les DERMS leur permettent d’obtenir une vision unifiée des flux d’énergie en temps réel, tout en coordonnant intelligemment la réponse des actifs énergétiques distribués.
Grâce aux DERMS, les services publics peuvent contrôler finement la tension, la fréquence, la charge et éviter les déséquilibres. L’approche multi-niveaux, du poste source à l’équipement terminal, permet une gestion granulaire de la flexibilité, avec des consignes ajustées dynamiquement selon les conditions réseau.
Les DERMS permettent aux gestionnaires de réseau d’obtenir une vision unifiée des flux d’énergie en temps réel, tout en coordonnant intelligemment la réponse des actifs énergétiques distribués.
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Réponse en temps réel aux événements réseau
Un des avantages décisifs du DERMS est sa capacité à réagir en quelques secondes face à un aléa : montée subite de la demande, panne d’un actif, congestion locale. Le système évalue alors les marges de flexibilité disponibles (batteries, effacement, V2G) et déploie instantanément les ressources nécessaires pour maintenir la stabilité du réseau.
Cette approche proactive, possible grâce à l’intelligence distribuée et à l’optimisation algorithmique, rend le réseau plus résilient face aux imprévus.
Le V2G (Vehicle-to-Grid) transforme les véhicules électriques en unités de stockage mobiles. Lorsqu’ils ne roulent pas, ils peuvent réinjecter l’énergie stockée dans leur batterie dans le réseau, soutenant les pics de consommation et favorisant l’intégration des énergies renouvelables.
Prévision de la charge et gestion des congestions
Les DERMS s’appuient sur des modèles prédictifs avancés pour anticiper les courbes de charge, les pointes de consommation ou les pics de production renouvelable. Cela permet d’ajuster la stratégie d’activation des ressources et de prévenir les congestions ou les pertes techniques.
Dans des scénarios où la production solaire est élevée mais la consommation faible (comme en milieu d’après-midi), un DERMS peut par exemple :
Réduction des investissements lourds sur l’infrastructure
Le déploiement d’un DERMS permet aux gestionnaires de réseau de repousser ou d’éviter certains investissements structurels coûteux. En optimisant l’utilisation locale des ressources existantes, le DERMS allège la pression sur les postes sources, les lignes de distribution et les transformateurs, évitant ainsi des renforcements d’infrastructure prématurés.
Cette capacité à utiliser la flexibilité disponible en réponse à une demande croissante, sans déployer de nouvelles capacités physiques, constitue un levier d’économie budgétaire majeur pour les services publics.
Priorisation de la flexibilité énergétique locale
Plutôt que de dimensionner le réseau pour des pics rarement atteints, un DERMS permet de mobiliser les ressources énergétiques distribuées au moment le plus opportun. Il priorise les actions à l’échelle locale, modulation de charge, stockage, production et libère le réseau principal de contraintes excessives.
Les principaux avantages opérationnels observés sont :
En pilotant finement la flexibilité locale, les DERMS rendent le système plus agile, plus adaptable, et mieux dimensionné aux usages réels.
Réduction des pertes, fiabilisation du réseau
Les réseaux traditionnels souffrent souvent de pertes techniques liées à la distance entre les points de production et de consommation. En maximisant l’usage des DER proches de la demande, le DERMS réduit ces pertes, ce qui améliore le rendement global du système.
De plus, en ajustant localement les tensions, les puissances actives et réactives, il contribue à la stabilité et à la sécurité du réseau, même en présence d’énergies renouvelables intermittentes.
Amélioration de l’efficacité énergétique et des performances économiques
Un DERMS bien configuré permet de réduire les coûts opérationnels (OPEX) liés à la maintenance, à l’équilibrage et à la gestion des pics de consommation. Il facilite aussi l’intégration tarifaire dynamique et la participation à des marchés flexibles, générant ainsi des revenus complémentaires.
Pilotage d’un parc mixte : solaire, éolien, batteries
Les services publics exploitant des ressources variées doivent gérer la variabilité des énergies renouvelables. Le DERMS s’impose ici comme outil central de coordination. Il surveille la production, détecte les anomalies, et ajuste les consignes d’injection ou de stockage.
En cas d’excès de production solaire à la mi-journée, il peut par exemple limiter l’injection ou activer le stockage. Lorsque l’éolien se renforce la nuit, il équilibre la charge en s’appuyant sur les batteries ou les flexibilités disponibles. Ainsi, le système maintient la qualité de service, tout en maximisant l’usage des énergies locales.
Réponse à la demande et délestage intelligent
Le DERMS joue également un rôle clé dans les stratégies d’effacement. Lorsqu’un pic de consommation est prévu, il anticipe et mobilise les actifs disponibles pour soulager le réseau. La modulation de certaines charges industrielles ou la recharge décalée de véhicules électriques permettent d’éviter les dépassements critiques, sans affecter les usages essentiels.
Cette capacité à répondre à la demande en temps réel constitue un levier de performance opérationnelle et un atout économique, en limitant le recours à l’énergie de pointe.
Programmation horaire et dispatch 24h
En intégrant des modèles de prévision, le DERMS établit un planning d’activation glissant sur 24 heures. Chaque DER reçoit des consignes ajustées toutes les 30 minutes, selon l’évolution de la charge, de la météo ou des besoins réseau.
Cette programmation dynamique assure :
Grands campus, zones industrielles, microréseaux
Les environnements multi-bâtiments avec production locale représentent un terrain d’application idéal pour les DERMS. Sur un campus universitaire ou dans une zone industrielle, il permet d’optimiser la consommation locale, de prioriser les usages, et d’échanger efficacement avec le gestionnaire de réseau.
Un DERMS bien configuré peut différencier les sources disponibles, affecter les usages en fonction de leur criticité et garantir une résilience énergétique accrue.
Les environnements de consommation complexes comme les sites industriels sont un terrain d'application idéal pour les DERMS.
Coordination multi-actifs et gestion fine des flux
Dans ces contextes complexes, le DERMS fournit une supervision unifiée des actifs : photovoltaïque, éolien, stockage, bornes de recharge. Il centralise les données, détecte les inefficacités, et ajuste les flux en fonction des priorités définies.
Par exemple, il peut reporter la recharge des véhicules à un créneau plus favorable ou optimiser l’autoconsommation d’un bâtiment spécifique en fonction de la météo ou de la demande attendue. Cette coordination fine améliore la performance énergétique sans multiplier les interventions humaines.
DERMS : pilotage localisé, réseau de distribution
Le DERMS est conçu pour gérer la flexibilité énergétique au niveau du réseau de distribution. Il opère dans une logique fortement localisée, prenant en compte la topologie du réseau, les contraintes physiques (tension, capacité de ligne), et la localisation des ressources.
Il permet notamment :
Cette approche ciblée est essentielle pour garantir la fiabilité d’un réseau alimenté par des DER nombreux, intermittents et parfois imprévisibles.
À l’inverse, une centrale électrique virtuelle (Virtual Power Plant) agrège des ressources réparties dans un objectif de participation aux marchés de l’énergie. Elle se concentre moins sur la localisation des actifs et plus sur leur performance globale. Son rôle est de fournir de l’énergie ou de la capacité à la demande, en s’appuyant sur un portefeuille diversifié.
Les VPP sont particulièrement utilisées pour :
Leur logique d’agrégation est donc économique et centralisée, là où le DERMS privilégie une gestion technique et localisée.
Les zones ISO (Independent System Operator) et RTO (Regional Transmission Organization) désignent des entités américaines qui gèrent la stabilité et l’équilibre du réseau électrique dans de grandes régions. Elles assurent la coordination, l’optimisation des flux et l’équilibre offre/demande entre producteurs et consommateurs.
Quand et comment combiner les deux systèmes
Il n’est pas rare de voir un DERMS et un VPP coexister. Par exemple, un DERMS peut assurer la gestion opérationnelle des actifs localisés, tandis qu’un VPP agrège ces mêmes ressources pour participer aux marchés.
Cette combinaison permet de :
Le DERMS peut donc jouer le rôle de gestionnaire technique, tandis que le VPP agit en tant qu’interface économique.
Enjeux de l’interopérabilité et des protocoles
Cette complémentarité suppose une interopérabilité fluide entre les deux systèmes. Les plateformes doivent pouvoir échanger des données, partager des consignes et respecter les priorités respectives : contraintes réseau pour le DERMS, opportunités économiques pour le VPP.
L’usage de protocoles ouverts, standards, et interconnectés devient ici un prérequis, tout comme la capacité à coordonner les signaux de commande pour éviter les conflits (ex. activation simultanée contradictoire).
Critère | DERMS | VPP (Virtual Power Plant) |
Finalité principale | Optimisation locale du réseau de distribution | Participation aux marchés énergétiques |
Zone d’action | Localisée (nœuds spécifiques du réseau) | Régionale ou nationale |
Type de gestion | Technique et opérationnelle | Économique et commerciale |
Sensibilité à la localisation | Forte (tension, charge, capacité locale) | Faible (performance globale agrégée) |
Services rendus | Gestion de la tension, de la charge, stabilité | Réserve, arbitrage, effacement, trading |
Interopérabilité requise | Élevée (intégration IT/OT, SCADA, OMS) | Élevée (interopérabilité marché, API) |
Complémentarité possible | Oui, en tant que gestionnaire réseau | Oui, en tant qu’agrégateur et opérateur marché |
Hétérogénéité des protocoles et des systèmes propriétaires
L’un des principaux obstacles au déploiement massif des DERMS est la multiplicité des protocoles, des architectures logicielles et des interfaces propriétaires. Chaque fournisseur de DER ou de solution de supervision développe ses propres standards, rendant l’interconnexion difficile.
Pour que le DERMS fonctionne efficacement, il doit pouvoir dialoguer avec tous les équipements du réseau, indépendamment de leur fabricant. Cela suppose une interopérabilité native ou des capacités d’adaptation via des interfaces ouvertes (comme IEC 61850). C’est un enjeu majeur pour les opérateurs souhaitant intégrer progressivement de nouveaux actifs.
Nécessité d’un logiciel indépendant et modulaire
Un DERMS efficace doit être agnostique du matériel, capable de centraliser l’information provenant de différentes technologies. Les exemples les plus avancés, comme la plateforme zenon déployée en Corée, montrent l’intérêt d’un système indépendant, modulaire, capable d’orchestrer à distance plusieurs sources d’énergie.
Un tel outil permet :
Protection des infrastructures critiques
L’ouverture du réseau à des milliers d’actifs connectés augmente la surface d’exposition aux cyberattaques. Les DERMS, en tant que passerelle entre le réseau opérationnel et les ressources externes, doivent respecter les normes de cybersécurité les plus exigeantes.
Cela implique l’implémentation de :
Les attaques sur les réseaux électriques ne sont plus hypothétiques. C’est pourquoi la sécurité dès la conception du DERMS est une priorité absolue.
Collecte, nettoyage et gestion des données distribuées
La valeur du DERMS repose en grande partie sur sa capacité à traiter de grandes quantités de données, souvent issues de sources hétérogènes et dispersées. Ces données doivent être :
Sans une gouvernance rigoureuse, les données peuvent devenir un facteur de risque plutôt qu’un levier de performance. Cela passe par la mise en place de référentiels unifiés, de structures de données communes, et d’une collaboration étroite entre les équipes IT et opérationnelles.
Optimisation de la production intermittente
L’intégration massive des énergies renouvelables (éolien, solaire, biomasse) impose une gestion dynamique de l’intermittence. Contrairement aux centrales classiques, ces sources produisent en fonction de la météo et non de la demande. C’est ici que les DERMS jouent un rôle stratégique.
Ils permettent :
Ce pilotage automatisé permet non seulement d’éviter le gaspillage d’énergie propre, mais aussi de soulager le réseau central, souvent mal dimensionné pour gérer ces apports dispersés.
Stockage, V2G, flexibilité pilotée
Les DERMS ne se limitent pas à la gestion passive : ils orchestrent la flexibilité active des ressources. Cela inclut notamment :
En optimisant ces leviers, les DERMS réduisent la dépendance aux énergies fossiles et contribuent à rendre la transition énergétique viable à grande échelle.
Objectifs zéro émission, stratégie de neutralité carbone
L’électrification des usages, combinée aux engagements climatiques, pousse les entreprises à repenser leurs infrastructures énergétiques. Pour les professionnels, le DERMS devient un outil central de la stratégie climat.
Il permet de :
Les DERMS s’imposent donc comme des accélérateurs d’objectifs net zero, à l’échelle d’un site industriel, d’un campus ou d’un portefeuille d’actifs.
Pilotage prédictif, IA, machine learning et orchestration avancée
Grâce à l’intelligence artificielle et au machine learning, les DERMS gagnent en proactivité. Ils n’attendent plus forcément les alertes : ils peuvent anticiper les déséquilibres, les pics de consommation, ou les baisses de production renouvelable.
Leur puissance de calcul permet de :
Ce fonctionnement intelligent transforme le rôle du gestionnaire de réseau : d’opérateur réactif, il devient chef d’orchestre d’un écosystème énergétique distribué et décarboné.